Encore du Trévail ?
Le hack & slash est un genre qui a tendance à se laisser aller. Si chaque nouveau titre essaie d’apporter sa propre marque de fabrique à travers un enrobage original ou une mécanique singulière, on en revient toujours au même point : seuls l’action et le loot importent. Runic avait parfaitement compris cette leçon en sortant le premier Torchlight en 2009, puis sa suite “bigger and louder” quelques années plus tard.
Sans prétendre réinventer la roue, la licence Torchlight est devenue un modèle d’efficacité, du hack & slash bête et méchant mais jamais malhonnête dans sa proposition. Dans ce qu’il montrait, Torchlight Frontiers brisait cette intégrité en ajoutant une dimension massivement multijoueur à cette couche de base, mâtinée de concepts issus d’une économie F2P. Une sorte de pied de nez aux fans de la licence, qui ne désiraient qu’un Torchlight II en menu maxi Best-Of.
Heureusement pour les joueurs, Frontiers a laissé sa place à un “vrai” Torchlight. Echtra Games a entrepris un long chantier de refonte du titre tel qu’il était encore quelques mois avant sa sortie, pour y insuffler des éléments avec lesquels les joueurs sont plus familiers. La structure ouverte s’est retrouvée découpée en actes, comme au bon vieux temps, tandis que la partie sociale se faisait quelque peu la malle au profit d’un focus sur le solo (ou une coopération basique).
Dans l’idée, le squelette est effectivement devenu plus proche de ce qui était fait auparavant, bien que quelques vestiges de la première version de ce Torchlight III subsistent. C’est le cas notamment de la récolte et du crafting, des forts à customiser comme on le ferait dans n’importe quel jeu mobile lambda, ou de l’interface indigeste optimisée pour on ne sait quel support.
En d’autres termes, et malgré les meilleures intentions du monde, Torchlight III part avec un handicap évident, provoqué par sa production chaotique et une réorientation forcément casse-gueule. Les ambitions d’un jeu gratuit ne peuvent pas être les mêmes que celles d’un titre vendu plus de trente euros (on notera la belle hausse de prix au passage depuis le deuxième opus), et pire encore : elles sont fondamentalement incompatibles.
Rixes et périls
Cependant, on aura beau pester contre la douloureuse influence du géant chinois, le coeur de jeu demeure un produit 100% Runic… Ou plutôt Echtra Games. Bien que la licence conserve un retard certain face aux corps désarticulés de Diablo ou Grim Dawn, ses premiers épisodes se sont toujours laissés jouer dans une bonne humeur communicative, une sorte de folie meurtrière salvatrice contre des dizaines et des dizaines d’ennemis, à un rythme effréné. A ce petit jeu Torchlight III ne démérite pas, bien au contraire. On passe d’un combat à un autre à une vitesse folle, dans un déluge d’effets visuels clinquants mais nécessaires.
Les hordes de monstres tombent une par une, alors que notre personnage se fraie un chemin d’un bout à l’autre des très jolis niveaux du titre. Un objet vert par-ci, un légendaire par-là, et toujours une quantité respectable d’objets à accumuler, bien qu’elle soit en net retrait par rapport aux montagnes d’équipements que l’on pouvait ramasser dans Torchlight II. Ce troisième opus se laisse tout de même aller à quelques outrances, comme ces grandes gerbes d’or tous les deux mètres, alors qu’il ne s’agit que de quatre misérables pièces supplémentaires dans votre besace.
En réalité, ce qui plombe vraiment ce Torchlight III, ce n’est pas forcément son modèle économique à la croisée des chemins, mais plutôt sa régression vis-à-vis de son prédécesseur. Sans être “hardcore” comme un Path of Exile, Torchlight II savait challenger les amateurs de hack & slash et leur en offrait une déclinaison plus que potable. Torchlight III ressemble à une version castrée de celui-ci. Moins de compétences, moins de loot, moins d’aléatoire, mais des combats plus accessibles et un univers toujours plus rondouillard : tout est fait pour en faire un parfait “premier” hack and slash, même si ce rôle est déjà pris par Minecraft Dungeons…
Ce test a été réalisé à partir d’une version dématérialisée, fournie par l’éditeur, sur PC.